Résolution de Côte Saint-Luc sur le projet de loi 96

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C A N A D A
PROVINCE DE QUÉBEC
VILLE DE CÔTE SAINT-LUC

EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE ORDINAIRE DU CONSEIL MUNICIPAL TENUE LE LUNDI 11 AVRIL 2022 À 20 H AU 5801, BOULEVARD CAVENDISH, CÔTE SAINT-LUC


220406
RÉSOLUTION DE CÔTE SAINT-LUC SUR LE PROJET DE LOI 96

ATTENDU QUE lorsque la Charte de la langue française, (R.L.R.Q. chapitre C-11) (« Charte ») a été adoptée par l’Assemblée nationale du Québec en 1977, elle comportait un préambule qui stipulait que la Charte devait être adoptée « dans un esprit de justice et d’ouverture, dans le respect des institutions de la communauté québécoise d’expression anglaise et celui des minorités ethniques, dont elle reconnaît l’apport précieux au développement du Québec »;

ATTENDU QUE le conseil municipal de Côte Saint-Luc (« Conseil ») représente une communauté où les résidents, qu’ils préfèrent utiliser soit la langue française ou la langue anglaise, vivent ensemble dans la paix et l’harmonie;

ATTENDU QUE depuis l’adoption de la Charte, la Ville de Côte Saint-Luc a été reconnue comme une institution bilingue en vertu de l’article 29.1 de la Charte, ce qui lui permet de fournir des services en anglais et en français;

ATTENDU QUE le gouvernement du Québec a déposé à l’Assemblée nationale un projet de loi intitulé « Loi sur la langue officielle et commune du Québec », appelé projet de loi 96;

ATTENDU QUE les amendements proposés dans le projet de loi 96 original prévoyaient des modifications à plusieurs clauses, de l’exigence du français pour les communications écrites à la spécification que le français doit être exclusivement utilisé pour les communications écrites et orales, aucune autre langue n’étant autorisée pour les membres d’un organisme de l’Administration, incluant les villes, et limitaient l’utilisation des communications écrites aux seules personnes admissibles à l’enseignement en anglais, ce qui rendra plus difficile pour les municipalités de servir les gens en anglais et plus difficile pour de nombreux Québécois d’obtenir des services dans la langue de leur choix;

ATTENDU QUE de rendre illégal le fait que deux employés du gouvernement du Québec ou d’une municipalité puissent se parler en anglais, même s’ils sont tous deux anglophones, découragera encore plus les Québécois anglophones de postuler ou de travailler pour le gouvernement du Québec. Selon le recensement de 2016, l’anglais est la première langue officielle parlée par 13,7 % de la population du Québec, mais seulement 1 % de la fonction publique du Québec est anglophone;

ATTENDU QUE le projet de loi 96 oblige tout organisme de l’Administration à déposer un rapport annuel en y indiquant le nombre de postes pour lesquels il exige la connaissance d’une langue autre que le français, sous réserve que le ministère responsable de la Langue française peut approuver, rejeter ou modifier ces directives;

ATTENDU QUE le projet de loi 96 contribuera de manière indirecte à faire en sorte que les cégeps anglais seront en déclin perpétuel. Pour ce faire, on fixe un plafond au pourcentage de places disponibles dans les cégeps anglophones, puis on met en place un système qui abaissera inévitablement ce plafond année après année;

ATTENDU QUE le 4 octobre 2021, le Conseil a adopté à l’unanimité une résolution exprimant ses vives préoccupations à l’égard de l’ébauche originale du projet de loi 96 et demandant au gouvernement de retirer le projet de loi 96 du feuilleton et d’entreprendre des consultations significatives auprès de la communauté anglophone;

ATTENDU QUE la Ville de Côte Saint-Luc (« Ville ») espérait que le projet de loi serait amélioré en commission, mais qu’au lieu de cela il a été aggravé par des amendements qui limitent davantage les droits des Québécois d’expression anglaise de fonctionner en anglais dans cette province et de recevoir des services dans leur langue;

ATTENDU QUE le projet de loi a maintenant été modifié pour limiter davantage la capacité des municipalités à faire les choses en anglais, même si c’est la préférence de la personne ou de l’entité avec laquelle elles traitent;

ATTENDU QUE l’amendement récemment proposé en commission à l’article 88.0.2. comprend une clause selon laquelle tous les étudiants fréquentant des cégeps de langue anglaise seraient tenus de suivre trois cours de base en français pour obtenir leur diplôme. Cette exigence affectera le taux de réussite des étudiants et aura une incidence négative sur leur moyenne, ce qui les désavantagera lorsqu’ils postuleront à des universités. De plus, les modifications ont été apportées sans consulter les étudiants ou les cégeps anglophones

ATTENDU QUE le nombre d’élèves inscrits dans les écoles publiques et privées de langue anglaise a diminué de 61,3 %, passant de 256 251 pour l’année scolaire 1971-1972 à 99 042 en 2019-2020;

ATTENDU QUE le projet de loi 96 aura un effet négatif supplémentaire sur le nombre d’enfants qui pourront fréquenter les écoles anglaises;

ATTENDU QUE les amendements proposés au projet de loi 96 en commission précisent que les documents juridiques d’une municipalité, y compris les contrats de travail et les contrats avec des tiers, doivent être produits en français, même si cela n’est pas demandé par l’employé, le tiers ou la municipalité;

ATTENDU QUE l’amendement récemment proposé en commission inclut maintenant l’article 204.29.1 qui stipule que si une municipalité enfreint la Charte, le ministre responsable de la langue française peut unilatéralement retenir tout son financement du gouvernement provincial du Québec, ce qui est arbitraire et ignore complètement le processus judiciaire et l’autonomie des municipalités;

ATTENDU QUE les organisations représentant la communauté québécoise de langue anglaise sont profondément troublées par le projet de loi 96;

ATTENDU QUE le Conseil et beaucoup des résidents de la Ville sont tout aussi préoccupés par les dispositions du projet de loi 96, et par les amendements proposés jusqu’ici par la Commission de la culture et de l’éducation;

ATTENDU QUE l’Association des municipalités de banlieue, dont fait partie la Ville de Côte Saint-Luc, s’est opposée fortement à la disposition du projet de loi 96 portant sur les municipalités comme Côte Saint-Luc;

ATTENDU QUE le 6 avril 2022, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et la Fédération québécoise des municipalités (FQM), qui représentent ensemble toutes les municipalités du Québec, ont exprimé leur forte objection aux récents amendements au projet de loi 96;

ATTENDU QUE le projet de loi 96 aura un impact sur les droits, les libertés et les obligations des résidents de la Ville en ce qui concerne leur capacité à utiliser la langue de leur choix dans la sphère publique;

ATTENDU QUE la législation linguistique ne doit pas générer chez la communauté minoritaire un sentiment de peur et de diminution de ses droits sans son consentement, et que ce sentiment est clairement ressenti aujourd’hui chez les Québécois de langue anglaise;


Il fut

PROPOSÉ PAR LE CONSEILLER STEVEN ERDELYI
APPUYÉ PAR LA CONSEILLÈRE ANDEE SHUSTER

ET RÉSOLU :

« QUE le Conseil demande à nouveau au gouvernement du Québec de retirer le projet de loi 96 du feuilleton et de consulter de façon significative la communauté anglophone de Québec et les associations telles que le QCGN (Quebec Community Groups Network) qui représentent la communauté avant de mettre de l’avant toute législation qui servirait à modifier la Charte de la langue française;

QUE le Conseil exprime également son point de vue selon lequel plusieurs des amendements contenus dans le projet de loi 96 et dans les amendements ultérieurs de la Commission de la culture et de l’éducation de l’Assemblée nationale contreviennent clairement à l’esprit de justice et d’ouverture et ne sont pas respectueux de la communauté anglophone du Québec, conformément au préambule et à l’esprit de la Charte de la langue française;

QUE le Conseil demande au gouvernement du Québec de consulter le Barreau du Québec et des experts constitutionnels avant de présenter une nouvelle législation afin de s’assurer que les droits accordés aux résidents du Québec en vertu de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Constitution canadienne et qu’ils ne sont pas restreints par toute modification à la Charte de la langue française;

QUE la Ville de Côte Saint-Luc demande au gouvernement du Québec de s’engager à ne pas utiliser de façon préemptive la clause dérogatoire pour cette loi et de s’engager à ce que la Charte de la langue française demeure assujettie à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec;

QUE la Ville de Côte Saint-Luc s’opposera vigoureusement aux modifications de la Charte de la langue française, y compris, mais sans s’y limiter, à celles qui:

  • Créent des coûts bureaucratiques et de la paperasse supplémentaire pour de multiples paliers du gouvernement du Québec, d’organismes municipaux et des entreprises privées;
  • Découragent davantage les Québécois anglophones à postuler pour travailler dans la fonction publique québécoise;
  • Réduit la capacité des résidents et des employés municipaux à avoir accès aux services dans la langue de leur choix;
  • Imposent des pénalités draconiennes, y compris la suppression de tout financement provincial si les municipalités servent les résidents dans la langue de leur choix ou permettent aux employés de communiquer entre eux dans une langue autre que le français;
  • Réduit davantage la capacité de nos résidents et des résidents du Québec à recevoir une éducation en anglais, ce qui pourrait affecter leur éventuelle carrière et leurs moyens de subsistance;
  • Réduisent davantage les droits des institutions bilingues, telles que les villes, à fonctionner tant en anglais qu’en français.

QUE la Ville de Côte Saint-Luc ordonne à son greffier municipal d’envoyer des copies de cette résolution à tous les membres de l’Assemblée nationale du Québec, y compris le député de l’Assemblée nationale D’Arcy McGee, à toutes les autres municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal, au député de Mont-Royal, à la ministre fédérale des Langues officielles, au commissaire aux langues officielles du Canada, à l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et à la Fédération canadienne des municipalités (FCM). »

ADOPTÉ À L’UNANIMITÉ


EXTRAIT CERTIFIÉ CONFORME


Me Jonathan Shecter
Greffier